Skip to main content

Étude de cas - Le laboratoire d’apprentissage à l’énergie solaire de Computer Aid : Durable, flexible et adaptable en fonction des besoins locaux to local needs

Écrit par Alejandro Espinosa, Computer Aid

Projet / Programme

Laboratoire d’apprentissage à l’énergie solaire (Solar Learning Lab - SLL)

Région/Pays

Ghana, Kenya, Maroc, Nigeria, Sierra Leone, Afrique du Sud, Togo, Zambie, Zimbabwe, Colombie et Mexique

Site web

https://www.computeraid.org

Circularité

Accès aux technologies ; énergie solaire ; réutilisation de conteneurs maritimes ; formation des communautés marginalisées

Résumé

Le laboratoire d'apprentissage à l'énergie solaire (SLL ou Solar Learning Lab en anglais) est un conteneur maritime converti en salle de classe. Onze stations d’utilisation fonctionnent à partir d’un réseau de clients léger, en réalité un réseau à basse consommation doté d’un serveur, alimenté à travers un système fonctionnant à l’énergie solaire. Si l’on compte l’espace extérieur et les ordinateurs portables, un laboratoire permet à 20 personnes d’avoir accès en même temps à l’internet, à travers une connexion sans fil. Il s’agit donc d’un espace qui offre une connexion mobile autonome aux communautés mal desservies dans le monde, à des personnes qui n’auraient autrement pas accès aux technologies de l’information et des communications (TIC) en raison des coûts exorbitants des infrastructures et des difficultés économiques. Chaque laboratoire est conçu en fonction des besoins de la communauté locale et de son contexte. Nous visons à mettre en place au moins 10 laboratoires d’apprentissage à l’énergie solaire par an d’ici 2030, en partenariat avec Dell Technologies.

À propos du projet

Malgré l’expansion année après année des technologies, une grande partie de la population mondiale n’a toujours pas un accès direct à certaines des formes les plus basiques des technologies. L’Union internationale des télécommunications estime que fin 2019, 53.6% de la population mondiale utilisait l’internet. Même s’il ne s’agit que d’un indicateur, il laisse entendre que près de la moitié de la population mondiale n’y a toujours pas accès.

Cette situation est préoccupante. En effet, elle contribue à creuser les inégalités envers certaines parties de la population et plus particulièrement dans le monde en développement. Les personnes sans accès internet n’ont aucune possibilité d’acquérir les compétences requises dans le monde moderne. Ces inégalités dans l’accès au numérique empêchent donc certaines populations (les personnes pauvres, isolées, âgées, handicapées et autres) d’avoir les mêmes opportunités que les autres.

Lancement du premier laboratoire à énergie solaire

C’est en 2011 que le premier laboratoire à énergie solaire, ou Zubabox comme il s’appelait à l’origine, a été installé, au village de Matcha en Zambie. En 2014, nous avons conclu un partenariat avec Dell Technologies pour répliquer et adapter cette expérience au Nigeria. Le succès de ce programme, qui a signifié une telle transformation pour les communautés locales, a amené Dell à le sponsoriser et lui apporter un soutien total. En 2015, des laboratoires ont été ouverts en Colombie et en Afrique du Sud, où nous avons aujourd’hui 14 laboratoires. En 2018 et 2019, nous avons déployé des laboratoires au Kenya, en Sierra Leone, au Maroc et au Mexique. Nous avons pour objectif d’atteindre les 100 laboratoires d’ici 2030.

Pour le dernier laboratoire inauguré en novembre 2020, nous avons établi un partenariat avec Zenzeleni Community Networks au Cap oriental, en Afrique du Sud. Ce déploiement est unique dans le sens où nous visons également à mettre à profit l’expérience de Zenzeleni en matière d’installation et de gestion de réseaux communautaires. Nous souhaitons répliquer leur succès auprès des communautés rurales pour leur donner accès à la connectivité et aux outils de communication, grâce aux petites subventions qu’octroie APC. Nous pourrons documenter un processus d’apprentissage dans lequel nous examinerons dans quelle mesure un réseau communautaire et un laboratoire d’apprentissage à l’énergie solaire peuvent s’associer pour améliorer leur impact positif et leur durabilité.

Nous avons reçu cette année une subvention de Dell pour déployer quatre autres laboratoires en 2021 : un au Mexique, deux en Égypte et un en Australie. Ce dernier est destiné à des communautés aborigènes vivant dans des régions isolées.

Rassembler différents partenaires

L’un des aspects les plus positifs du programme de laboratoires est sa capacité à attirer et rassembler différents partenaires dont l’objectif est d’impacter positivement sur une communauté par le biais des technologies et de programmes de formation en TIC. Nous considérons notre modèle comme un exemple réussi de partenariat établi entre trois secteurs essentiels : la société civile, le secteur public et le secteur privé. Computer Aid a beau être une ONG internationale, nous travaillons toujours en partenariat avec des organisations locales à but non lucratif. Celles-ci sont propriétaires du laboratoire, chargées de leur gestion au quotidien. La participation du secteur privé implique différents organismes donateurs, dont Dell, principal donateur. Nous avons également reçu des dons de logiciels de la part de Microsoft et le soutien d’entreprises de télécoms en matière de connectivité. Les laboratoires  engagent des bénévoles de Dell qui apportent leur soutien dans les communautés et ont été jusqu’à faire des dons aux associations caritatives locales.

Le secteur public s’est quant à lui dans de nombreux cas impliqué, il a apporté son soutien et contribué à financer le programme. Ainsi, le gouvernement local de Xalapa au Mexique a financé toute l’infrastructure ; il a également sélectionné et préparé le site où mettre en place le programme, dans une école publique. Quant au gouvernement de l’État de Mexico, il a lui aussi soutenu le programme en lui octroyant des espaces dans des écoles locales et en aménageant les sites pour pouvoir y déployer les laboratoires.

Une solution sur mesure

Depuis 2011, nous avons fourni 32 laboratoires solaires au total. Certains sont des doubles laboratoires solaires, avec deux conteneurs maritimes qui se font face pour former une plateforme centrale dotée d’ordinateurs supplémentaires. Cela permet d’augmenter la capacité en ordinateurs et le nombre de places assises. Le second conteneur sert quant à lui aux formations spécialisées. Nous offrons ainsi au Mexique une formation en robotique avec notre partenaire local Fundación Robotix.

Le programme SLL de laboratoires propose un espace unique pour enrichir les ressources d’apprentissage, renforcer les capacités des institutions locales et offrir à la population locale l’accès aux compétences du 21e siècle.

Nos partenariats auprès des organisations locales nous permettent d’offrir des solutions sur mesure, adaptées aux besoins et aux contextes locaux. Avec notre programme, la technologie est un outil pour la transformation et la participation. En effet, si les compétences en matière de TIC sont essentielles pour réussir dans le monde moderne, la mise en place d’un laboratoire d’apprentissage à l’énergie solaire constitue également un moteur de transformation et d’inclusion pour les communautés traditionnellement marginalisées.

Nous suivons de près les répercussions de nos laboratoires. Depuis 2014, nous avons ainsi fourni 10 000 heures d’accès internet par laboratoire et par an à plus de 17 000 étudiants et étudiantes défavorisées dans le monde.

Durabilité et flexibilité

La réplicabilité du programme a été largement démontrée. En effet, depuis sa mise en route il a déjà été déployé dans plus de 11 pays. De plus, la réutilisation de conteneurs est une solution durable, aussi bien en matière de sécurité pour les appareils technologiques, que pour leur utilisation de l’énergie solaire. Nous avons trop vu comment de nombreuses organisations ouvrent des laboratoires similaires sans garantir la sécurité du matériel alors que la zone a un taux de criminalité élevée, ou sans infrastructure d’alimentation en électricité.

Le laboratoire de Pujehun au Sierra Leone est un bon exemple de stratégie de durabilité. En partenariat avec MOPO (MobilePower), il a créé un système de prêts pour offrir des batteries externes à la communauté. En raison des besoins en électricité, la demande a explosé, si bien que le centre dispose aujourd’hui d’un revenu stable qui lui permet de fonctionner sans investissements supplémentaires.

À Cazucá, en Colombie, la fondation Tiempo de Juego, une ONG locale, œuvre en faveur des enfants et des jeunes des zones marginalisées à travers le sport et des programmes éducatifs périscolaires. Elle a transformé, avec succès, un SLL en studio de formation et de production. Celui-ci offre des formations en informatique, en édition de vidéos et photos, en création audiovisuelle et en journalisme. C’est également devenu un studio de production, grâce à un don de matériel informatique spécialisé tel que des caméras vidéo 3D, le système de création numérique Dell, des PC et des logiciels d’édition de vidéos. Ce studio fonctionne en tant qu’entreprise sociale, ce qui permet de financer tous les frais courants du laboratoire, y compris ceux des autres programmes.

Un an après le déploiement de chaque programme, nous travaillons auprès de nos partenaires locaux pour mettre en place une stratégie de durabilité. L’infrastructure du laboratoire et le soutien qu’apporte le secteur privé permettent à nos partenaires privés de bénéficier des synergies et des opportunités qu’offre le programme, bien au-delà des programmes traditionnels de don d’ordinateurs. De plus, la campagne médiatique et de marketing que nous menons dans chacun des pays vise à inviter davantage de partenaires à financer d’autres programmes du même type. Il nous faut en effet attirer de nouveaux partenaires et d’autres sources de financement pour pouvoir répliquer notre programme.

Les défis

Il arrive que le SLL ait des coûts élevés de logistique et de transport, selon le lieu et le contexte de sa mise en place. Il peut également être vu comme une imposition par la communauté locale, à la différence des structures en dur construites localement. La solution que nous proposons n’est pas universelle, et il convient de l’adapter en fonction du contexte et des besoins spécifiques de la population locale. L’expérience nous a appris que l’une des meilleures manières de réussir l’appropriation à niveau local consiste à en adapter le design à chaque communauté. Un studio d’architectes basé à Londres, Squire and Partners, nous apporte son soutien pour concevoir des laboratoires en fonction de leur contexte. Des artistes locaux sont également invités à rendre leur laboratoire unique. Nous avons pu observer combien cette touche artistique ajoutait à cet espace une dimension de pôle local à l’origine de nombreuses externalités positives, au-delà de la simple salle informatique, contribuant ainsi à la transformation de la communauté.

Il peut arriver que les limites en termes de place posent des difficultés. Cependant, le projet est adaptable en fonction des besoins locaux. C’est ainsi qu’au Mexique, nous avons créé le nouveau concept de doubles conteneurs qui a permis de consacrer un espace à l’apprentissage de la robotique en plus du laboratoire d’informatique.

Conclusion

Le SLL est un exemple de programme qui amène les principaux acteurs à mettre les technologies et l’éducation à la portée des communautés marginalisées dans le monde. Il a pour but de réduire les inégalités de l’accès au numérique et de promouvoir aussi bien les pratiques durables que l’utilisation des énergies renouvelables.

Notre modèle repose largement sur les dons et le soutien d’entreprises pour pouvoir offrir l’infrastructure et le programme de formation des laboratoires. Nous réutilisons les conteneurs maritimes et y ajoutons un système d’énergie renouvelable, des aspects essentiels qui contribuent à rendre notre programme unique. Les espaces que nous proposons sont innovants, sûrs, adaptés à l’apprentissage dans des lieux isolés et, si nécessaire, il est possible de les déplacer, à la différence d’une infrastructure traditionnelle en dur. Autre avantage, le processus de réglementation est généralement plus long et bureaucratique pour des constructions comme des écoles ou des salles de classe que pour le déploiement d’un laboratoire en conteneur.

L’un des principaux enseignements de notre programme, que d’autres organisations pourront trouver utile, est que lorsqu’on offre une solution innovante tout-en-un au lieu de faire don de technologies à des institutions déjà établies, non seulement on attire davantage de partenaires et de bailleurs de fonds, mais la communauté locale se sent plus impliquée et participe davantage que dans les espaces traditionnels que sont les écoles ou les centres communautaires.

Nous reconnaissons que cette solution ne peut pas être adaptée partout et pour toutes les organisations qui œuvrent pour réduire la fracture numérique. Dans certains cas, il peut s’avérer plus rentable de proposer des méthodologies d’intervention traditionnelles et de, par exemple, faire don d’ordinateurs à des écoles. Ce type d’intervention peut également toucher davantage de bénéficiaires que le SLL dont l’espace est plus limité. Nous recommandons cependant fortement de créer des programmes innovants qui améliorent l’impact au-delà de simples considérations quantitatives telles que le décompte du nombre d’ordinateurs installés ou le taux de fréquentation des étudiants et étudiantes.

Références

Statistiques de l’Union internationale des télécommunications : https://itu.foleon.com/itu/measuring-digital-development/internet-use 

Laboratoires d’apprentissage à l’énergie solaire : https://solarlearninglabs.org

Computer Aid : https://www.computeraid.org

Voir les rapports de pays dans l’Observatoire mondial de la société de l’observation 2020 pour les pays suivants :

Argentine : https://www.giswatch.org/node/6265

Bangladesh : https://www.giswatch.org/node/6266

Costa Rica : https://www.giswatch.org/node/6267

Inde : https://www.giswatch.org/node/6234

Nigeria : https://www.giswatch.org/node/6237

République démocratique du Congo : https://www.giswatch.org/node/6232